La lettre n°75Vie des maisons

Les chiens de La Caravane

Tous trois ont des maîtres salariés de l’Etablissement. Autant vous dire qu’ils connaissent bien les lieux, coins et recoins, qu’ils en ont vu passer des enfants et qu’ils sont bien au fait des situations. Bah oui, ils participent aux réunions !!! il faut bien savoir qui a besoin de câlins ou de se dépenser.

Chacun d’eux a grandi à La Caravane, leurs caractères sont très différents mais ils s’entendent parfaitement et évoluent en harmonie avec les enfants.

Idylle est sans doute la meilleure gardienne, elle veille et prévient dès qu’un-une inconnu-e se montre. La nourriture est sa passion. Elle obéit quand elle veut.

Oscar, c’est un gentil, un doux, un tendre. Il était destiné à servir d’appât aux requins à La Réunion. Il a été sauvé par une association. Très attaché à son maître, et on comprend pourquoi, il lui voue un attachement sans borne. Ce n’est pas un rebelle et il a intégré les règles.

Paneer, encore jeune, pour lui tout est jeu. C’est aussi un gentil mais, vu son gabarit, il doit apprendre à maîtriser ses marques d’affection et sa force. Il a sa maîtresse mais il aime tout le monde. Son éducation, qui n’est pas terminée, a amené à différentes situations avec les enfants, surtout les petits.

Pour les enfants, leur question essentielle a été : comment on éduque, on interdit sans taper ?

C’est ainsi, qu’un jour, un petit demande à me parler. Il s’installe dans le bureau, Paneer est présent avec une seule et unique envie, jouer avec le petit. Comme il s’agite dans tous les sens, ce qui ne facilite pas l’échange, je me lève et dit « ça suffit Paneer ». Le petit me regarde me diriger derrière mon bureau et me dit « tu vas faire quoi, tu vas le taper ? ». Je réponds que non mais que Paneer doit faire un exercice pour se calmer. Je lui mets son collier et l’exercice est qu’il doit rester assis sans bouger, ce qu’il fait. Nous reprenons la conversation avec le petit mais il est intrigué par la scène. Il me dit « c’est tout ce que tu fais ? » et ma réponse est « oui, tu vois, il est sage ». Alors le petit me demande « tu veux que je te montre comment il fait mon papa ? », j’hésite un peu puis lui dit « oui ».  Alors, il attrape Paneer par son collier et le soulève, ce que j’arrête très vite. Le petit continue « bah moi, quand on n’est pas sage mon papa il nous tape ». Il me demande alors « je peux essayer comme toi ? » Nous échangeons nos places ; lui tient Paneer par sa laisse et moi assise. Paneer ne bouge pas, reste sage, assis. Avec le petit nous engageons la conversation sur la manière de se faire obéir, sans violence. Le petit fait le lien avec lui et les autres enfants de son groupe, « ici on tape pas ». Et je lui réponds « non, on tape pas, ni les enfants, ni les chiens ; tu vois il t’écoute même si tu es un enfant, tu ne t’énerves pas et lui non plus et comme ça on peut parler ». Le petit est sorti du bureau, vaillant, et s’adressant au groupe « et bah moi, Paneer il m’écoute ».

D’autres situations, nous ont amenés à comprendre, outre qu’ils soient des compagnons de jeux, des confidents, parce que ça aussi nous l’observons régulièrement, les chiens participent de l’accompagnement des enfants. Les limites que chaque maître leur pose, la manière dont ils sont repris, sont autant d’expériences partagées avec les enfants. Une séance avec l’éducateur canin sur place, uniquement avec les enfants, leur a permis d’apprendre les gestes, le ton à adopter, l’attitude à tenir pour se faire obéir et atteindre une certaine maîtrise dans la relation sans violence mais fermement. Et ça marche, ils savent faire.

Merci Idylle, Oscar, Paneer, les permanents, mais aussi Bolliwoo, Biscotte, Perle, Lady les intermittentes, nos fidèles et précieux aide-éducateurs/médiateurs/assistants d’éducation/animateurs sportifs/surveillants/câlineurs et bien plus encore.

Catherine Letourdu, directrice de La Caravane